Longtemps, tellement longtemps il avait hésité avant de se décider...
Arrivé depuis peu, résolu à s'implanter, la ville de Saumur lui avait semblé propice à cette fin de parcours...
Des premières heures timide, une visite des lieux, comme l'on pourrait dire, avant de franchir le seuil d'une taverne, et de s'asseoir dans un coin.
Comme souvent méfiant, comme toujours réservé, il avait attendu avant de prendre part à une conversation.
Des mots qui fusent, des présentations, les premiers bon mots, les premières complicités, on se promet de se revoir le lendemain, on commande une tournée générale, on se tappe dans le dos, on rit dans sa choppe...
Bref, le début du bonheur...
Une femme qui rentre dans la taverne, aussitôt il se remet en position de défense, cette satanée carapace qui à loisir de le protéger, mais aussi parfois de l'éloigner des autres...
Et finalement les surprises s'enchainent, bonnes, évidement, sur fond de dévoilement face à une inconnue, de questions que l'on pose, et de réponses franches qu'on en retire...
Qui était-il, lui le nouvel arrivant pour se voir accorder tant de faveurs?
Que représentait-il, lui le vagabon, pour qu'autant de temps lui soit accordé?
Que dégageait-il, lui le sans famille, pour que Madame le Maire elle même se souci de lui?
Aussi, dans le coeur d'Alto, quelque chose s'était cassé...
Car oui cassé, une pierre ne se déchire pas, ne plisse pas, ne se tord pas..la pierre casse...
Et sous les miette d'un organe gris et froid depuis longtemps, quelque chose était apparu, quelque chose d'inconnu pour lui...
Du rouge, de la chaleur, de la vie... toutes ces nouveautés qui s'assemblaient pour former un sentiment tout aussi inconnu , la grattitude.
Ne sachant pas comment exprimer cette grattitude, n'étant même pas sûr de savoir la qualifier de vertue, ou de péché, Alto avait réfléchit la matiné durant, posant même la question à des inconnues, sur l'attitude à adopter, la marche à suivre...
Tout simplement savoir se que l'on fait dans ces cas là...
Suite à de bons conseils, sa décision fût prise, il devait s'entretenir avec Madame le Maire...
De bonnes âmes lui indiquèrent un chemin, qu'il pris à pied, sous un vent qui nous rappelait que le printemps n'était plus qu'un lointain souvenir, et que s'était désormais Monseigneur Hiver qui regnait içi bas...
Finalement arrivé au pied du Domaine, il se ravisa un instant. Il lui sembla que sa démarche était inutile, même grotesque... Surement Madame le Maire ne se souvenait même plus de son nom, ni même de l'avoir croisé en Taverne. Evidement d'autres sujets accaparait son attention en ce moment même... A n'en point douter il serait répudié d'un geste de la main sans provoquer la moindre réflection, ou peut être de l'agacement...
Comment Madame le Maire pourrait accorder encore du temps à un tel manant, elle qui n'en avait que trop perdu...
Ses talons tournèrent, il se gifla lui même d'avoir été aussi présomptueux...
Il ne se souvînt même pas quelle folle entreprise l'avait mené en ce lieu...
Soudainement son coeur se fit violence en sa poitrine, semblant lui rappeler qu'il l'avait oublié depuis trop longtemps maintenant, et la grattitude se rappela à lui...
D'un pas chancelant, il s'approcha du Domaine, et pénétra la cour d'entrée...
Déterminé, mais sur le point de se faire péter une veine, il n'avait aucune idée de la marche à suivre...
Tant de portes, tant de fenêtres, tant de lumière, il passa un long moment comme celà, debout au milieu de la place, à regarder avec émerveillement un faste qu'il n'avait jamais connu...